Madagascar fait partie des pays les plus pauvres du monde. Plus de 76% de la population malagasy est « extrêmement pauvre ». Pourtant sa biodiversité est exceptionnelle : son patrimoine naturel unique fait de lui un haut-lieu de la diversité biologique mondiale. Alors, comment vit-on dans la cinquième plus grande île du monde ?
Des forêts sempervirentes aux plages de cocotiers, des déserts chauds et secs aux zones enneigées, des mangroves aux récifs coralliens, Madagascar bénéficie d’une biodiversité unique. La majorité de sa faune et de sa flore y est endémique. Elle dispose également d’abondantes ressources minières : pétrole, or, pierres précieuses, nickel, cobalt...
Du point de vue des ressources hydriques elle se situe à la cinquième place des pays d’Afrique subsaharienne. Et sa main d’oeuvre, jeune, est un atout supplémentaire.
Un des pays les moins avancés du monde malgré un potentiel énorme
En dépit de son potentiel économique, Madagascar est catégorisé dans les pays à « faible développement humain« , placé au 161ème rang sur 189 pays.
Une extrême pauvretéPlus de 24 millions d’habitants. Selon la Banque Mondiale, 76% d’entre eux vivent dans une « extrême pauvreté ». Plus de 92% de la population vit avec moins de 2 dollars par jour. Le rapport du Pôle Mondial d’Expertise en Pauvreté est limpide à ce sujet, ajoutant même que « cette pauvreté se conjugue à une productivité faible et décroissante » :
« En dépit de sa biodiversité unique et de ses abondantes ressources minières, hydriques et en main-d’oeuvre, Madagascar compte parmi les rares pays dont le PIB réel par habitant était inférieur en 2010 à son niveau de 1960. [...] Cela fait de Madagascar le plus pauvre pays d’Afrique sub-saharienne (et du monde) là où l’on dispose de données comparables au plan international. »
Pire, à Madagascar, les plus pauvres s’appauvrissent encore plus, notamment dans les zones rurales. La Banque Mondiale explique à ce sujet que « 80% de la population malgache vit en zone rurale où les taux de pauvreté sont plus de 2 fois plus élevés qu’en zone urbaine ».
L’exploitation des ressources minières ne semble pas véritablement profiter au développement du pays. Pour Willy Ranjatoelina, Secrétaire Exécutif de la Chambre des Mines de Madagascar, « le pays est certes riche en ressources minérales, mais elles restent largement sous-exploitées ». Il faut également lutter contre les « petits exploitants informels » qui « détourneraient » les profits liés à cette ressource.
Des causes variées à cette pauvreté persistante
Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette situation économique déplorable.
Instabilité et corruptionNous pouvons d’abord citer l’instabilité politique. Le coup d’État de 2009 a été suivi par des sanctions financières internationales. Le retour à l’ordre constitutionnel de 2014, n’a pas permis de légitimer le gouvernement. Selon le Fonds Monétaire International , « la communauté internationale n’a jamais reconnu le gouvernement provisoire ». Cette instabilité peut en partie s’expliquer par la « corruption généralisée » établie à Madagascar. Pour le FMI, les institutions ne sont pas en capacité d’empêcher la corruption de prospérer : trafics de pierres précieuses, de drogue, contrebandes d’espèces rares et protégées, corruption de fonctionnaires, captation de marchés publics, enlèvements...
« Les partis servent souvent à distribuer des faveurs au lieu d’être des instruments de participation des citoyens et de fourniture de biens publics. »
Un cercle vicieuxLa grande île est bloquée dans un cercle vicieux : la baisse de l’aide internationale encourage les fonctionnaires et la population à chercher d’autres ressources, la corruption s’installe. Parallèlement, un gouvernement corrompu va être rapidement considéré illégitime, ce qui entraîne une instabilité politique.
Les chocs climatiques, comme le cyclone Enawo qui avait placé Madagascar en état d’urgence absolue, fragilisent encore la situation économique, comme l’explique le Pôle Mondial d’Expertise en Pauvreté :
« Les ménages malgaches doivent faire face à une multitude d’aléas météorologiques qui peuvent à tout moment les précipiter plus encore dans la pauvreté. [...] Les circonstances naturelles qui provoquent de temps à autre ces pertes considérables, couplées à l’absence de mécanismes efficaces permettant de s’en prémunir, ont à la fois des effets dévastateurs à court terme sur la consommation, mais imposent aussi de se protéger contre les risques, ce qui réduit durablement les revenus. »
Une dégradation environnementaleMadagascar fait partie des 10 pays au monde les plus vulnérables aux aléas climatiques. 99 000 hectares de forêts sont perdus chaque année. Pourtant, préserver la richesse de la biodiversité malagasy est une clé pour le développement économique futur du pays. Quand on sait que le secteur agricole est la principale source de revenus pour 80% de la population, la dégradation environnementale est un fléau pour l’île.
L’UNICEF interpelle la communauté internationale au sujet de la sécheresse :
« En 2017, après 3 années de sécheresse, les indicateurs de malnutrition sévère était les pires dans le pays. »
Autre facteur du manque de développement, le système éducatif limité. Madagascar est le 5ème pays au monde qui compte le plus grand nombre d’enfants non scolarisés.
Il existe un autre défi pour Madagascar, l’exploitation des richesses locales par les puissances étrangères : l’île est le nouvel eldorado pour les compagnies minières et pétrolières. Un maximum de profit pour les multinationales internationales, un minimum pour le gouvernement malagasy.
« Face à cette situation, le peuple de Madagascar est la première victime de l’approche prédatrice croissante des sociétés internationales qui tentent de tirer le meilleur parti des ressources minérales de l’île. »
Des conséquences tragiques pour la population
Des infrastructures déficientesDans une telle situation économique, les infrastructures sont déficientes. Le taux d’accès à l’électricité est l’un des plus bas du monde : 13% de la population. En zone rurale, ce taux descend à 4%. À peine plus de 10% de ses routes sont pavées. L’immense majorité des voies de circulation est donc impraticable à la saison des pluies, isolant les populations. Le réseau ferré est vétuste, et le transport aérien à l’intérieur de l’île reste insuffisant. Selon la CIA, 1 habitant sur 2 n’a pas accès à une eau potable et 88% de la population n’a pas accès à des installations sanitaires.
Les enfants sont les premières victimesLes enfants sont les premières victimes de cette fragilité économique. Selon un rapport des Nations Unies, « 12% des enfants malagasy ne vivent pas avec leurs parents ». Ils sont ainsi rendus vulnérables au tourisme sexuel et à la prostitution.
L’exploitation sexuelleL’âge moyen du début de la prostitution se situerait autour de 13 ans pour les filles et 12 ans pour les garçons. La PMPM de Tananarive a confirmé que les enfants victimes d’exploitation sexuelle étaient de plus en plus jeunes et que leur nombre ne cessait d’augmenter. Certains dénoncent les coutumes : la société tolèrerait l’exploitation sexuelle des enfants, la communauté et les parents peuvent être complices de cette situation.
« Le mirage du vahaza est également très fort, en particulier dans certaines régions côtières. Avoir un étranger, censé être riche, pour partenaire sexuel, est considéré comme une réussite pour la fille : une telle relation, outre les bénéfices matériels qu’elle procure - et que la fille serait obligée de partager avec sa famille - apporterait un certain prestige. »
Dans certaines régions, le « marché aux filles » existe encore. À Madagascar, « les jeunes filles sont exhibées pendant le marché des bovidés ». Malgré la loi de 2007, les mariages précoces persistent.
La pauvreté persistante aux conséquences tragiques pour la population malgré un potentiel rare, Madagascar reste une énigme. Les spécialistes parlent de « contre-performance économique », notant que « le pouvoir d’achat des malgaches a perdu un tiers de sa valeur entre 1950 et 2015, alors que celui de l’Afrique subsaharienne triplait ». Madagascar doit relever des défis démesurés.
Depuis bientôt 30 ans, un homme a décidé de relever ces défis et oeuvre au quotidien pour faire reculer la pauvreté
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La rédaction
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